Le groupe gabonais Movaizhaleine : Rap, tradition et engagement

09/05/2023 – Jocksy Andrew Ondo-Louemba

Fondé en 1992, Movaizhaleine est un groupe de rap emblématique du Gabon qui a su se distinguer par l’usage d’instruments de musique traditionnels mais aussi par des textes très engagés.

Movaizhaleine est sans doute le groupe de rap le plus populaire du Gabon mais aussi le plus engagé. Créé en 1992 par trois membres dont Maat Seigneur Lion (Yvon Moussodou à l’Etat Civil) et par Lord Ekomy Ndong (EKomy Ndong Mba Meyong de son vrai nom) Movaizhaleine assoit sa notoriété en 2000 avec la chanson Aux choses du pays devenue culte qui reprend une chanson de Pierre Claver Akendengue avec Annie Flore Batchilillys au refrain.

« Pays riche, peuple pauvre »
Dans cette chanson, le groupe décrit sans complaisance la société gabonaise ses maux, sa paupérisation mais aussi dénonce le mirage de l’eldorado gabonais tant vanté : « Pays riche, peuple pauvre. Comble des combles : comme un dreads locks chauve » cette formule est encore utilisée par de nombreux  Gabonais pour décrire leur pays notamment les énormes inégalités sociales qui le caractérisent. Dans cette chanson aussi, on entend un instrument bien connu des Gabonais : la harpe du Gabon avec son son mélodieux caractéristique…

« L’armée en main, comment ne pas régner en maître ? »
Dans ses textes, le groupe critique l’ensemble de la classe politique qui est ultra majoritairement issue du même parti politique: le PDG.  Pour Mauvaizhaleine ils ont les mêmes méthodes : « Les uns ont pillé hier, les autres pillent aujourd’hui, ensemble ils ont produit ce à quoi le » chante Mâât dans Territoire occupé. Dans cette même chanson, Lord Ekomy ajoute :


« Le Pays souffre
Le Peuple étouffe
Pendant qu’Ils font leurs courses
Mains dans la main vous l’avez poussé Tous
aux bords du gouffre
Majorité / faux opposants Pardon taisez-vous tous ! ».


Dans cette chanson, le pilier du pouvoir qu’Ali Bongo a hérité de son père est clairement nommé : « l’armée en main, comment ne pas régner en maître ? ».

Les chiens et les panthères

Aujourd’hui, le groupe séduit encore et garde intacte sa popularité. En réponse à Pascaline Bongo qui avait déclaré : « Mon père disait que le chien aboie la caravane passe, mais cette fois-ci la caravane ne passera pas. Elle va s’arrêter pour voir la qualité des chiens » le groupe de Rap a répondu en chanson : « les chiens aboyaient, la caravane passait, mais un bon matin, les panthères vont les remplacer,« Vous allez faire comment ? »
Pour rappel, la panthère noire est le symbole du Gabon et de son peuple. Peuple gabonais à propos duquel le groupe se veut prophétique :
« La Panthère noire elle-même n’avait encore prononcé un seul mot.
Mais on sait que sa parole Serait la dernière.
On dit de ce fauve qu’il n’attaque pas.
Mais nul n’ignore combien il peut se montrer redoutable
lorsqu’il se sait menacé… ». (Territoire occupé)