Dans une note du 30 septembre, la Banque mondiale anticipe un rebond de la croissance en 2024 au Niger après une année de crise politique « sans précédent ». Elle estime, cependant, que la reprise de l’économie nigérienne dépendra « de la situation sécuritaire et des conditions climatiques, ainsi que de la vigueur de la production de pétrole destinée à l’exportation. »
Le rapport consacré à la situation économique et la pauvreté au Niger présente des prévisions à trois ans. Il insiste particulièrement sur la nécessité pour le pays d’investir massivement sur « l’amélioration de l’accès à un enseignement primaire et secondaire de qualité » et formule des recommandations sur l’action à mener dans ce domaine.
Le Niger est l’un des pays au monde dont le système éducatif est le moins performant, ce qui est un frein majeur au développement.
La crise politique provoquée par le coup d’Etat du 26 juillet 2023 et les sanctions commerciales et financières imposées pendant six mois par la communauté ouest-africaine ont considérablement réduit l’activité économique, constate la Banque mondiale. La croissance du PIB, estimée avant la crise à presque 7% en 2023 et 12% en 2024, sur la base de l’exportation de pétrole à grande échelle, a plafonné finalement à 2% en 2023.
Une économie résiliente
« Les dépenses publiques ont chuté en raison du gel des avoirs, de la perte des financements régionaux et d’une réduction significative des financements extérieurs, estimée à environ 7,5 % du PIB. L’investissement privé a également fortement diminué en 2023 en raison du climat d’incertitude et d’une crise de liquidité dans le secteur bancaire imputable aux sanctions financières », indique la Banque, sans surprise. Mais Han Fraeters, le responsable des opérations de la Banque mondiale pour le Niger, souligne que l’économie nationale a fait preuve, dans ce contexte difficile, de « résilience », « en partie grâce à l’intervention proactive des autorités ».
« Ces mesures ont permis au gouvernement de continuer à payer les salaires du secteur public et de gérer la crise énergétique causée par l’interruption des importations d’électricité en provenance du Nigéria. L’économie nigérienne reste toutefois fragile et largement tributaire de l’agriculture pluviale, ce qui la rend vulnérable aux chocs climatiques. Il est essentiel d’investir dans le capital humain, et en particulier dans l’éducation, pour parvenir à une croissance inclusive et durable », estime-t-il.
Avec la levée des sanctions en février 2024 et le rétablissement partiel des financements, la croissance pourrait remonter à 5,7 % cette année. « Ce rebond serait tiré par les exportations de pétrole, tandis que les secteurs non pétroliers (industries et services), qui ont subi de lourdes pertes en 2023, peinent à se relever », explique le rapport. « Compte tenu des prévisions de croissance, le taux d’extrême pauvreté devrait diminuer à partir de cette année, pour s’établir à 42,5 % d’ici à la fin de 2026. Cette projection suppose que la production agricole progresse fortement et que la hausse des revenus pétroliers soit efficacement exploitée au profit de la population. »
L’après pétrole
Mais Mahama Samir Bandaogo, économiste senior à la Banque mondiale et co-auteur du rapport, met en garde les autorités du pays sur l’avenir. « Alors que la production et les exportations de pétrole devraient augmenter les recettes publiques, elles vont également amplifier la volatilité de la croissance. Il s’agit en outre d’une ressource limitée et, en l’absence de la découverte de nouveaux gisements, les réserves pétrolières du Niger devraient commencer à décliner à partir du milieu des années 2030. »
« C’est pourquoi il est crucial de se concentrer sur l’amélioration de la productivité en investissant notamment dans le domaine de l’éducation (…) qui nécessite des investissements considérables », insiste-t-il.