Tunisie, des révélations sur « le cabinet noir » des islamistes

04/10/2018 – Nicolas Beau

Le comité de défense des leaders assassinés de la gauche tunisienne, Chokri Bélaïd et Mohamed Brahmi, a dénoncé, le mardi 2 octobre, l’existence d’un cabinet noir organisé par les islamistes tunisiens, Sans apporter pour l’instant les preuves de l’implication directe du mouvement Ennadha dans les assassinats politiques de 2013.

Le comité de défense de Chokri Belaid et de Mohamed Brahmi a révélé l’existence des milliers de documents sur les deux assassinats, mais enfermés hélas dans une « chambre noire » fermée à double tour du ministère de l’intérieur. Autant de documents subtilisés de dossiers d’instruction judiciaire qui n’ont toujours pas pu être exploités.

Mustapha Kheder, l’homme de l’ombre

Les enquêtes du comité de défense ont porté sur Mustapha Khedher, un ancien membre du groupe de militaires, dit de « Barraket Essahel », qui ont été partie prenante du mouvement islamiste sous la présidence de Ben Ali et sévèrement réprimé par le régime. Depuis la fin de la dictature en 2011, cet ancien officier avait été placé en détention, puis libéré,  pour son implication dans les affaires des assassinats politiques.

Or Mustapha Khedher était en possession de la liste complète des sécuritaires et militaires impliqués avec le mouvement, de même qu’il possédait la liste compète des cadres sécuritaires avec leurs coordonnées et leurs fonctions. Il disposait aussi de la liste exhaustive des grands délinquants notoires du grand Tunis, avec leurs coordonnées personnelles. Lesquels ont été impliqués dans l’attaque contre l’UGTT.

Des aveux partiels

Mustapha Khedher reconnait par ailleurs, qu’il était chargé de gérer et de répondre au courrier personnel d’Ali Laârayedh, alors ministre de l’Intérieur, alors qu’il ne faisait même pas partie du personnel du ministère. Ce qui laisse présumer de ses contacts étroits avec la direction d’Ennahdha

Mustapha Khedher en possession d’un document expliquant comment l’ancien terroriste condamné sous Ben Ali, Abou Iyadh, avait quitté la mosquée Al Fath, où la police le cernait pour avoir organisé l’assaut de l’ambassade américaine,  pour se réfugier dans la région de Menzel Bouzelfa où il existait un camp d’entraînement du mouvement Ansar Achariaâ qu’il avait créé à l’époque. D’où la duplicité d’ Ali Laârayedh, ministre à l’époque de l’Intérieur, qui est fatalement au courant de sa cachette au moment où les policiers qu’ol est censé commander le recherchent sans succès.

Le prix du sang

Tout aussi grave, des enregistrements audio ont été retrouvés chez Mustapha Khedher montrant comment il tentait de ses renseigner sur des militaires, des sécuritaires et des journalistes, à partir d’un réseau d’informateurs. Sans parler des documents liés aux assassinats de Belaïd et Brahmi où l’on apprend que l’assassin avait encaissé 300000  dinars. Il était enfin en possession d’éléments montrant qu’il avait échoué dans deux tentatives d’exfiltration, sous escorte sécuritaire, de Mohamed Aouadi, un des principaux suspects dans ces meurtres.

Pour renforcer les preuves des liens directs entre Mustapha Khedher et les leaders d’Ennahdha, trois cartes SIM étrangères ont été découvertes chez l’intéressé. Elles lui servaient pour ses contacts confidentiels, notamment avec Rached Ghannouchi et Rafik Abdesalem, le chef des islamistes et son gendre qui fut en 2012 et 1023 un ministre des Affaires Etrangères totalement inféodé au Qatar.

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